Le prélèvement à la source va peut-être vous contraindre à effectuer une grosse avance de trésorerie au fisc !

Le passage au prélèvement à la source a été présenté à gros renforts de communications comme n’ayant que des avantages pour vous. Mais si vous disposez de quelques réductions d’impôts ou crédit d’impôts récurrents, vous avez dû avoir une surprise en effectuant votre déclaration d’impôts début juin. À moins que vous n’ayez pas suffisamment prêté attention au taux de prélèvement à la source que vous a calculé le site impots.gouv.fr, et alors remarqué la roublardise du fisc dans le calcul du taux de prélèvement à la source ?

 

Le taux de prélèvement à la source calculé avant prise en compte des réductions et crédits d’impôts !

C’est en effet là que le bât blesse : votre taux de prélèvement à la source pour 2019 a en effet été calculé par le fisc avant prise en compte des réductions et crédit d’impôts, y compris lorsque ceux-ci sont récurrents chaque année.

 

Un exemple vaut mieux qu’un long discours : l’avance de trésorerie induite par le mode de calcul du taux de prélèvement à la source.

  • Mr et Mme Machin sont un foyer avec des revenus de : 60 000 €. Imaginons pour simplifier ces revenus stables sur les années 2017 à 2019.
  • Impôts avant réduction et crédit d’impôts : 10 000 €
  • Réduction d’impôt immobilier défiscalisant (Scellier, Duflot, Pinel, etc.) : 5000 €
  • Crédit d’impôt pour emploi salarié à domicile : 2000 € (l’employé est employé à l’identique d’une année sur l’autre).
  • Impôt payé chaque année après réduction et crédit d’impôt : 3000 € / an.

M et Mme Machin ont payé 3000 € d’impôts en 2018 sur leurs revenus 2017. Ils n’en payeront pas sur leur revenus 2018 (remboursement par le mécanisme du CIMR et donc année blanche). Ils en paieront 3000 € en 2019 sur leurs revenus 2019, année de mise en place du prélèvement à la source.

Sauf que si le fisc “avait fait les choses bien”, le taux de prélèvement à la source du foyer Machin serait de 3000 / 60 000 = 5%. M et Mme Machin seraient alors chaque mois prélevés à la source sur leurs revenus mensuels de 60000 /12 = 5000 €, c’est-à-dire de 5% de leurs revenus, soit de 250 €. Or, 250*12 donnent bien 3000 €, et le tour était joué. Le paiement de leurs impôts était équitablement réparti sur l’année, en gros comme avant (peu ou prou indépendamment s’ils étaient mensualisés ou payaient les 3 tiers).

Pourtant, en déposant leur déclaration d’impôts début juin 2018, M. et Mme Machin ont lu sur le site impots.gouv.fr, “Votre taux de prélèvement à la source pour l’année 2019 sera de 16,67%“.

Ces 16,67 % ont été calculés comme 10 000 / 60 000, donc avant prise des réductions et des crédits d’impôts. Et comme nous allons le voir, entre 5% et 16,67%, il y a une différence non négligeable…

Ils vont donc payer chaque mois 60000 * 16.67 % =  833 € de janvier à septembre 2019 (prélevés à la source sur leurs salaires), déboursant ainsi 7 497 €. Le fisc leur reversera bien la différence par rapport aux 3000 € (soit 4 497 €) qu’ils doivent, mais seulement au moment de l’avis d’imposition de septembre 2019… Ils auront donc effectué jusqu’à au maximum 4 497 € d’avance de trésorerie en excès au fisc pour un montant d’imposition annuelle de 3000 € !

Calcul taux prelevement source désavantageux

De la même façon, des personnes qui ne payaient pas d’impôts vont se retrouver à avoir une retenue sur salaire de janvier à août 2019, comme dans l’exemple de M.Jemesuisfaiteu ci-dessous :

  • Salaire mensuel je me suis M.Jemesuisfaiteu : 2 000 € sur 13 mois (soit 26 000 € annuels)
  • Impôt annuel avant réduction d’impôts : 2 600 €
  • Réduction d’impôts annuelle (studio en Scellier) : 2 600 €
  • Impôt annuel payé après réduction d’impôts : 0 €.

Alors que M.Jemesuisfaiteu payait 0 € d’impôt par an (et donc par mois), dés janvier 2019, il va se voir prélevé un taux de 2600 /(2000*13) = 10%  sur 2000 € = 200 € de son salaire chaque mois. Il aura donc 1800 € en bas de sa fiche de paie de janvier à septembre 2019 au lieu de 2000 €. Avant que le fisc lui rembourse les 200 * 9 = 1800 € de trop perçu en septembre 2019.

Le site officiel du ministère confirme bien cette interprétation sur ces 2 cas.

Qui sera pénalisé et impacté cette avance de trésorerie significative au fisc ?

Les plus impactés seront ceux qui ont effectué un investissement immobilier défiscalisant leur assurant une réduction d’impôts annuelle récurrente, ceux qui investissement chaque année dans des produits tels que les Sofica ou les FIP Corse, ou ceux qui ont des crédits d’impôts récurrents (emploi de salarié à domicile, garde d’enfants, etc.)

Le fisc justifie ce choix par une absence de temps pour développer autre chose. La justification me semble un peu légère. D’une part, parce que le calcul du taux de prélèvement à la source est effectué sur la base d’une simple division à partir du calcul d’imposition effectué à la fin de votre déclaration d’impôts, et qu’il suffirait de changer le numérateur de celle-ci par une autre ligne pour calculer le taux de prélèvement à la source après prise en compte des crédits et réductions d’impôts plutôt qu’avant. D’autre part, parce que cette réforme était à la base prévue pour être mise en oeuvre un an plus tôt et qu’elle a été reportée d’un an pour des raisons politiques.

Un (petit) geste du gouvernement à venir ?

Face à la fronde des quelques-uns qui se sont aperçus de cela, le gouvernement a indiqué qu’un acompte serait versé aux personnes dont le crédit d’impôt est lié à une garde d’enfant (de moins de 6 ans) ou à de l’aide à domicile. Cet acompte de 30% devait être payé avant la fin du premier trimestre de l’année suivante, voire dès le mois de janvier.

On n’a en revanche à ce jour pas entendu parlé de geste pour les autres réductions d’impôts (Scellier, Pinel, Duflot, Sofica etc.).

Espérons que cette trésorerie prise sur les nombreux particuliers bénéficiant d’une réduction d’impôts pour une raison quelconque ne freine pas la consommation de ces particuliers sur les premiers mois de 2019, histoire de tuer la reprise de la croissance dans l’oeuf…

John Galt

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4 réflexions au sujet de “Le prélèvement à la source va peut-être vous contraindre à effectuer une grosse avance de trésorerie au fisc !”

  1. Édifiant !!! Je vais aller regarder de ce pas… Il faut vraiment prévoir le coup… Merci pour l’info 🙁

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  2. C’est impensable ce mode de calcul 🙁
    Je ne sais pas faire cette avance de trésorerie .
    Bien l’economie Pendant 9 mois mais qui a réfléchi ainsi ?? C’est un gag ! (Emploi à la personne, défiscalisation) …
    Revoyez votre copie sinon bonjour l’austerite Début 2019 ….

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  3. Parmi les annonces de ce 4 septembre 2018, le biais de cette avance de trésorerie qui avait été dénoncé aussi serait en partie corrigée. Etait-ce un des éléments qui avait alerté Macron et sur lequel il voulait des explications ?
    La forme envisagé serait un chèque en janvier à hauteur de 60% des crédits d’impôts.
    C’est mieux, mais encore une fois pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Il aurait suffi que les impôts prennent la bonne ligne (après crédit d’impôts) au numérateur de leur calcul de taux de prélèvement à la source dès le départ… Et il était sûrement trop tard pour vous communiquer un nouveau taux…

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  4. Autre cas : Les baux ruraux sont payés par le preneur une fois par an, à terme échu. Généralement en fin d’année.
    Le montant des prélèvements fiscaux 2019 sera donc effectué par anticipation tout au long de l’année alors que la recette 2019 n’arrivera qu’en décembre. Jolie avance de trésorerie n’est-il pas.
    Ne faudrait-il pas sur ces avances, réclamer une pénalité de 10% au fisc ?
    Vous avez dit justice fiscale ?….

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