Jouer à domicile pour les équipes de sport procure-t-il encore vraiment un avantage ? Que ce soit au foot ou au rugby, les statistiques semblent dire que oui, mais pourquoi ?
Autrefois, quand les distances étaient effectuées en bus, cela paraissait logique. Mais aujourd’hui où les équipes de football voyagent en avion privé, ce qui a drastiquement raccourci les temps de déplacement, est-ce que ça l’est toujours ?
Absolument. Dans leur livre Scorecasting: The Hidden Influences Behind How Sports Are Played and Games Are Won, Toby Moskowitz et Jon Wertheim ont compilé le pourcentage de matchs à domicile remporté par des équipes dans tous les sports majeurs américains. Certains ensembles de données remontent plus loin que d’autres (les chiffres de la MLB sont depuis 1903, les chiffres de la NFL commencent en 1966, et ceux de la MLS en 2002). L’échantillon est toutefois assez grand pour être représentatif.
Pourcentage de Matchs joués à domicile gagnés :
Major League Baseball 53,9%
National Hockey League 55,7%
National Football League 57,3% (football américain)
National Basketball Association 60,5%
Major League Soccer 69,1% (football classique)
Il est donc difficile d’argumenter contre l’avantage du terrain. Mais pourquoi cet avantage existe-t-il ?
Il y a beaucoup de théories à considérer, comme le fait de dormir dans son propre lit, de manger à la maison, la familiarité avec le terrain, ou encore le soutien de la foule.
Toutes ces théories pourraient a priori faire sens. Dans Scorecasting, Moskowitz et Wertheim compilent des données pour tester une variété de théories populaires. Vous pourriez être surpris (et peut-être même déçus) en lisant leur conclusion : quand les athlètes jouent à la maison, ils ne semblent pas mieux frapper avec leur batte de baseball, ou faire de meilleures passes au football. La foule ne semble pas aider tant que ça l’équipe qui joue à la maison, ni faire déjouer les visiteurs. Quant aux vicissitudes du voyage, elles peuvent expliquer une partie de l’avantage du terrain, en particulier dans les sports universitaires, mais leur impact est négligeable dans de nombreux sports professionnels.
Donc, si ces théories populaires ne disposent pas d’un pouvoir explicatif convaincant de l’avantage du terrain, quelle est l’explication qui fonctionne ?
En un mot : les arbitres !
Moscowitz et Wertheim ont trouvé que les équipes à domicile obtiennent essentiellement un traitement légèrement préférentiel des arbitres, que ce soit une troisième basé jugée atteinte au baseball ou une faute qui se traduit par un penalty au football.
L’ordre relatif de l’avantage du terrain selon les différents sports renforcent d’ailleurs cette théorie. Il est en effet indiscutable qu’un arbitre de football a plus de latitude pour influencer le résultat d’un match que les arbitres dans les autres sports, ce qui contribue à expliquer pourquoi l’avantage du terrain est supérieur dans le football, partout dans le monde, que dans tout autre sport professionnel. Le reste du classement reste logique avec cette théorie : les fautes sifflées et lancers-francs obtenus ont une influence dans le basket (certes seulement sur les matchs serrés), alors que les décisions arbitrales auront moins d’influence potentielle au baseball ou au hockey. On pourrait ajouter à la démonstration du côté européen en prenant l’exemple d’un sport comme le rugby, qui corrèle une grosse importance de l’arbitre (pénalités sifflées) et un important avantage pour l’équipe qui joue à domicile (certes renforcée en Top14 par la propension des entraîneurs à faire tourner leur effectif à l’extérieur)
Moscowitz et Wertheim exposent également une nuance importante: ce biais officiel est tout à fait involontaire. Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela signifie que les arbitres ne décident pas consciemment de donner un avantage à l’équipe qui joue à la maison. Le phénomène mis en jeu réside plutôt dans le fait que les arbitres étant en tant qu’êtres humains des créatures sociales comme le reste d’entre nous, ils assimilent l’émotion de la foule à la maison. Et de temps en temps, cela va les influencer pour prendre une décision qui va rendre très heureux tous ces gens bruyants qui sont à immédiate proximité d’eux.
L’argument le plus convaincant et habile en faveur de cette théorie provient d’un article de recherche de Thomas Dohmen à propos de l’avantage du terrain en Bundesliga, la ligue de football allemande. Dohmen a démontré que l‘avantage du terrain était plus faible dans les stades entourés par une piste d’athlétisme autour du terrain de football, et plus grand dans les stades sans piste.
Pourquoi les arbitres avantagent-ils les équipes à domicile ?
Apparemment, quand la foule se trouve plus près du terrain, les officiels sont plus susceptibles de “se faire prendre dans l’émotion” de la foule à la maison. Ou, comme le dit Dohmen : “L’atmosphère sociale dans le stade conduit les arbitres à du favoritisme alors qu’être impartial maximiserait leur probabilité d’être reconduit pour d’autres matchs”.
Il semble donc que ce soit le soutien de la foule qui importe, mais pas dans de la façon dont vous pourriez avoir pensé a priori : l’influence de celle-ci est sur l’arbitre plutôt que sur les joueurs ! Gardez cela à l’esprit la prochaine fois que vous crierez à tue-tête lors d’un match de football. Assurez-vous que vous savez après qui vous êtes censé crier…
J’ai pensé à l’idée de cet article en relisant des écrits des auteurs de Freakonomics dont nous avions parlé ici, et qui aiment bien étudier ce genre de choses.
A travers cet exemple du domaine du sport, il montre que même lorsqu’on s’estime être un investisseur contrarien, il est peut-être impossible de se soustraire totalement de l’influence de la foule. C’est-à-dire qu’acheter des actions en bourse quand tout le monde crie au cataclysme comme ces derniers temps restera difficile, même pour un investisseur averti et expérimenté. Et à l’inverse, ne pas conserver trop longtemps des actions survalorisées quand tout s’emballe le sera aussi.
Nous cherchons à être au maximum rationnel et contrarien pour investir intelligemment. Mais nous restons des êtres humains, et tout être humain reste soumis à des biais comportementaux, et autres biais cognitifs qui biaisent nos décisions, en investissement comme dans les autres domaines. Comme on ne peut pas totalement y échapper, en être conscient est déjà un premier pas parfaitement louable et tout à fait utile.
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